ANGOULÈME 2015 - Le Grand Prix du Festival d'Angoulême 2015 a été décerné jeudi 29 janvier à Katsuhiro Otomo, le Japonais qui a fait découvrir les mangas aux Français et qui est le père de la série culte Akira. C'est la première fois que le Festival international de BD attribue ce prix à un dessinateur de mangas.
Celui-ci a réagi dans cette vidéo après l'annonce de son prix:
A noter que le Festival d'Angoulême a également décerné un Grand Prix spécial aux dessinateurs de Charlie Hebdo tués dans l'attentat contre le journal satirique le 7 janvier: Cabu, Wolinski, Charb, Tignous et Honoré. C'est l'un des nombreux hommages rendus cette année au journal satirique par le festival.
"Je suis Charlie, ce n'est pas faire sonner les cloches de Notre-Dame ni transformer en héros nationaux ceux qui chiaient sur le pouvoir sur toutes ses formes", a déclaré avec passion l'éditeur de bande dessinée Jean-Christophe Menu, venu jeudi soir recevoir ce prix au nom du journal, dont l'équipe des survivants n'a pas souhaité venir.
Ce week-end sera attribué un nouveau "Prix Charlie de la liberté d'expression", qui pour sa première édition ira également aux dessinateurs disparus de Charlie Hebdo. Il couronnera dans l'avenir les auteurs qui se battent pour la liberté d'expression.
Par ailleurs, seront désignés dimanche les neuf "Fauves d'Angoulême", les lauréats du Festival : 62 albums sont en compétition, dont 35 dans la Sélection officielle.
Pour les Japonais, le père du manga s'appelle Ozamu Tezuka. Vous vous souvenez peut-être d'Astro le petit robot, son œuvre la plus connue. Mais les Français ont découvert le manga, ces BD japonaises en noir & blanc qui se lisent à l'envers avec Katsuhiro Otomo. Entre 1990 et 1992, les éditions Glénat ont été les premières à rencontrer le succès avec une série japonaise: Akira, dont le film animé était sorti sur les écrans en 1988, à l'heure où l'on n'avait que Disney à se mettre sous la dent côté animation au cinéma. Une baffe pour les frenchies, et la découverte de 31 volumes de concentré de BD dans un monde post-apocalyptique hyper-violent au style ultra-réaliste.
Certes, pour répondre au goût du public français, les albums étaient alors lisibles de gauche à droite, provoquant quelques incohérences entre le texte et l'image car les planches de BD étaient retournées comme dans un miroir afin de rendre la lecture plus accessible pour un européen (un bras gauche blessé devenait alors un bras droit). Et, pour attirer le plus grand nombre, les planches avaient alors été colorisées. La traduction, quant à elle, était un peu approximative car traduite... de l'anglais.
Mais qu'importe, le succès a été là, ouvrant la voie dès 1993 à Dragon Ball. Désormais, toutes les librairies BD ont leurs rayons manga dont le succès est exponentiel depuis une dizaine d'années.
Rassurez-vous, au Japon aussi Katsuhiro Otomo est considéré comme un géant de la BD. Les quelques 2500 pages de ce monument qu'est Akira continuent de fasciner, d'autant que l'auteur n'a jamais cédé à la tentation de réaliser une suite ou un préquel.
Technologie, théologie, mythe du sauveur, action, fantastique, amitié, super-pouvoirs, drogue, délinquance... La cohérence du monde et la diversité des thèmes abordés font d'Akira une BD à la richesse rare, que l'on peut relire sans problème 4 à 5 fois en découvrant à chaque fois de nouveaux aspects de l'œuvre. Si vous ne l'avez jamais lu, ne soyez pas étonné en revanche si ledit Akira tarde à apparaître: contrairement à ce que certains croient, Akira n'est pas le nom du personnage présent sur les affiches du film. Ce dernier s'appelle Kaneda.
Otomo n'est toutefois pas l'auteur d'une seule œuvre, quoique majeure. Il a également été à l'origine d'autres dessins animés, comme Metropolis en 2002 (réalisé par Rintarō) et surtout Steamboy en 2004:
Il a également dessiné Dômu, un huis-clos oppressant, une inquiétante histoire paranormale se déroulant dans une cité. A lire d'urgence.